Il avait gardé le silence pendant deux longues années. Mais en cette soirée du 27 juillet 2025, c’est une voix qui renaît, celle de Mohammed Assaf, « la voix de la Palestine », venue briser l’ombre du mutisme sur la scène du Festival international de Carthage. Drapé dans sa keffieh, le chanteur est apparu, le regard grave, la voix forte, porteur d’une douleur collective, mais aussi d’un espoir inflexible.
Le concert, intitulé « Pour Gaza », s’inscrivait dans le cadre de la 59e édition du festival. Plus qu’un spectacle, c’était un acte de résistance, une déclaration d’amour à sa ville meurtrie et un hommage vibrant à ceux qui continuent de survivre à l’indicible. La soirée s’est tenue en présence de la ministre tunisienne des Affaires culturelles, Mme Amina Srarfi.
Dès les premières notes, le public a compris que cette soirée ne ressemblerait à aucune autre. Les chants « Ana Dammi Falastini » et « Ali El Keffiyeh » ont immédiatement plongé les spectateurs dans l’intensité de la cause palestinienne. Les drapeaux tunisien et palestinien flottaient haut dans les airs, la keffieh était omniprésente dans les gradins, et les cris « Bil rouh, bil dam, nafdik ya Falastin » fusaient de toutes parts.
Contrairement à son précédent passage à Carthage en 2021, marqué par l’enthousiasme et la joie, cette performance fut empreinte de gravité. Le sourire d’Assaf, lorsqu’il apparaissait, semblait douloureux, presque volé à l’instant. Sa voix, elle, portait une intensité bouleversante. Chaque note semblait porter les ruines de Gaza, chaque parole une prière, chaque chanson une promesse.
Avec puissance et émotion, il a lancé un message aux consciences endormies: « Ô peuples de la terre, unissez-vous dans la douleur. Ô Arabes, réveillez-vous, que la flamme de l’arabité se ravive. » Et dans un moment de silence sacré, « Ya Dounia Alay Ichhadi » est venue comme une clameur, un hymne contre l’oubli, une révolte contre l’indifférence.
Les recettes du concert, symbole fort de solidarité, seront entièrement reversées aux habitants de Gaza. Une manière pour l’artiste de continuer le combat autrement, en musique, en poésie et en humanité.
Carthage, ce soir-là, n’a pas seulement accueilli un concert. Elle a entendu le cri d’un peuple, porté par une voix qui ne se taira plus.

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